2. François Hollande et les chars de l'armée rouge.

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retour armée rouge

 

Deuxième épisode de notre nouvelle série consacrée au suivi de l’élection présidentielle, dans le cadre du blog-notes. Aujourd’hui, retour sur une semaine qui commence avec l’annonce d’une possible réforme du quotient familial par l’équipe de François Hollande. La riposte ne se fait pas attendre, c’est la surenchère dans les réactions des soutiens du candidat sortant pour stigmatiser le candidat socialiste. A force de ne pas respecter ses adversaires politiques, l’UMP renoue avec un ancien registre qui l’avait conduit à agiter le spectre des chars de l’armée rouge, place de la Concorde, suite à l’élection de François Mitterrand. Mais derrière l’agitation vient aussi l’heure des comptes. La semaine se termine par la perte du trop fameux triple A.


Alors qu’on semble nous reprocher de ne pas dévoiler assez tôt notre programme électoral, une fuite dans l’entourage de François Hollande évoque une possible réforme du quotient familial. Il faut préciser que cet avantage fiscal est source d’inégalités puisqu’il ne profite qu’aux familles imposables et qu’il devient plus important en fonction du nombre d’enfants et du niveau de revenus.  Ainsi, nous devons garder un chiffre en tête : 10 % des français imposables les plus riches captent plus de 25 % des revenus du quotient familial. La réforme viserait à redistribuer vers les revenus les plus modestes, vers les classes moyennes via des crédits d’impôt pour une amélioration de leur pouvoir d’achat. Les inégalités actuelles du quotient familial sont telles qu’un moment, Bruno Lemaire, ministre UMP de l’agriculture et en charge du futur programme du candidat sortant, avouait sur ce point qu’ « en période de crise, on peut demander un effort à ceux qui peuvent davantage ».


Il n’en fallait pas plus que cette annonce d’une possible révision du quotient familial pour voir la droite présidentielle se déchainer et oublier ses propres doutes antérieurs. Fidèle au spectre des chars de l’armée rouge de 1981, Bernard Accoyer, Président UMP de l’Assemblée Nationale, prédit la catastrophe en cas de victoire de la gauche aux prochaines présidentielles : « si nous ratons ce rendez-vous de 2012, les conséquences économiques et sociales pourraient être comparables à celles provoquées par la guerre. ». Il n’en fallait pas plus pour la très délicate Nadine Morano de voir en « François Hollande un homme dangereux pour la France .» Le 11 janvier dernier, un éditorial du Figaro annonçait qu’ « Hollande s’attaque au pacte national ». Cependant, à force de vouloir dénoncer l’incurie socialiste, la surenchère verbeuse d’une partie de la droite n’allait pas tarder à devoir se confronter aux réalités de sa propre gestion, depuis près de 10 ans de pouvoir sans partage.


On se souvient du Président sortant qui roulait des mécaniques au G20 de Cannes pour humilier le Premier ministre grec qui envisageait de consulter son peuple pour l’énième plan de rigueur imposé à Athènes. On se rappelle d’un François Fillon qui annonçait être à la tête d’un Etat en situation de quasi faillite, fin 2007. On retrouve le Premier ministre, au début de cette semaine, persifflant sur la gauche en lui reprochant d’ « aligner les promesses comme les notes d’une symphonie injouable ». Reste que notre mélomane locataire de Matignon terminera la semaine en entendant une toute autre note, bien moins mélodieuse. La France perd, vendredi dernier son triple A, tandis que l’Allemagne conserve le sien. C’est toute la stratégie présidentielle qui s’effondre sur cette perte symbolique mais qui sonne le glas d’un quinquennat pour rien.


La fiction du don de soi à la France pour la sauver de la crise se dissipe. Nicolas Sarkozy voulait multiplier les projets de loi pour ses derniers 100 jours : TVA anti-sociale, Taxe Tobin, Hausse de la durée du temps de travail, nouvelles obligations de formation pour les chômeurs,… Le Président sortant se retrouve contraint à la posture du joueur de poker, lessivé par une partie qui a déjà duré près de 5 ans, à qui il ne reste que quelques jetons de jeu faute de les avoir dilapidés en cadeaux fiscaux.  Il ne peut que les pousser au milieu de la table de jeu, en se lançant dans un hasardeux tapis. Mais en se confrontant à la perte du triple A, Nicolas Sarkozy est un joueur dont on connaît le bluff dans ses cartes.  

Publié dans Présidentielles 2012

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